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Finance

« On a tous des biens que l’on souhaite valoriser »

Pour Touslesbudgets.com, Jean-Michel Cagin, expert auprès du cabinet OC&C Strategy Consultants, analyse les conclusions d’une étude* qu’il a menée sur la pratique de la consommation collaborative en France. Partager sa perceuse ou sa voiture séduirait un Français sur deux.

Touslesbudgets.com : Dans les grandes lignes, qu’apprend-t-on de votre étude ?

Jean-Michel Cagin : Qu’il y a un phénomène qui passe sous les radars alors qu’il est massif et fulgurant. Quand on étudie l’économie du partage sous les angles financier, du nouveau mode de consommation et de la technologie, on se rend compte qu’elle concerne de nombreux secteurs, qu’elle touche tout le monde et qu’elle prend du poids par rapport à l’économie traditionnelle.

TLB : Près d’un sondé sur deux aurait déjà pratiqué une forme d’économie du partage. Il n’y a donc pas de profil-type du « partageur » ?

J-M-C. : Non et c’est d’ailleurs assez surprenant. Notre étude -qui a été menée en partenariat avec Ouest France pour éviter tout biais parisien- révèle même que 15% des sondés la pratiquent plus d’une fois par mois. Ça touche tout le monde, du moins de 25 ans jusqu’au plus de 55 ans, indépendamment de toute catégorie socioprofessionnelle. Nous n’avons même pas discerné de critère de revenus.

TLB : Que partage ce « Monsieur tout le monde » ?

J-M-C. : Avant tout des objets du quotidien qui peuvent resservir -76% des pratiquants de l’économie du partage y ont déjà eu recours-, car les Français s’aperçoivent qu’ils ont tous des actifs immobiliers qu’ils peuvent valoriser. Viennent ensuite le covoiturage -deux tiers des pratiquants à l’avoir utilisé-, la location de chambres ou d’appartements entre particuliers.

TLB : Comment expliquez-vous l’engouement pour la consommation collaborative ?

J-M-C. : La crise est un catalyseur, car nous sommes dans un modèle gagnant-gagnant, pour celui qui arrondit ses fins de mois et pour l’utilisateur. Dans le cas du covoiturage, le tarif moyen est environ 66% moins cher qu’un billet SNCF. Airbnb, c’est 30 à 40% de moins qu’une chambre d’hôtel.

TLB : La volonté d’économie est seule responsable du développement de ces pratiques ?

J-M-C. : Il y a également une prise de conscience globale sur la nécessité d’être raisonnable dans sa consommation des ressources, mais aussi un ras-le-bol de l’obsolescence programmée et le développement d’un certain esprit de communauté. Et les technologies sont là, tout le monde a un smartphone aujourd’hui. On parle aussi d’un phénomène excessivement agile et rapide, qui n’a rien à voir avec une économie traditionnelle qui doit construire des hôtels ou employer des salariés. Les hôtels Marriott mettent un an à construire 70 000 nouvelles chambres d’hôtel. Ça prend deux semaines à Airbnb.

TLB : Qui est gagnant et qui est perdant dans ce système ?

J-M-C. : Avec ce modèle gagnant-gagnant, c’est le consommateur. A l’inverse, les hôtels ne sont pas encore les gros perdants. Les plus grosses menaces pèsent en réalité sur les intermédiaires, comme Booking.com ou Hotels.com, dans la mesure où Airbnb fait la même chose, mais directement auprès des particuliers. Quant au Bon Coin, qui était à l’origine un site entre particuliers, il concentre une telle audience que même les agents immobiliers s’y sont mis. Or celui qui gagne, c’est celui qui a de l’audience.

TLB : Ce modèle est-il appelé à durer ?

J-M-C. : Oui, car les facteurs qui le catalysent sont durables. On ne va pas sortir de la crise tout de suite, ni revenir à une consommation effrénée et la technologie ne va pas régresser. C’est là pour longtemps, les usages s’installent. C’est d’ailleurs le taux d’usage plus élevé chez les 25 ans, qui sont les consommateurs de demain, qui fait que le phénomène est là pour des années.

Propos recueillis par Benjamin Hay
© maglara

*Enquête réalisée en juin 2014 sur Internet auprès de 2 344 répondants de 18 à 65 ans.

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